Analyse de risques : Identification et estimation : Démarches d'analyse de risques - Méthodes qualitatives d'analyse de risques
CoursOutils transverses

Méthode de l'Arbre des causes

Objectif

Fondamental :

La méthode de l'Arbre des Causes consiste à analyser et à représenter les causes ayant contribué à l'occurrence d'une défaillance en se basant généralement sur des retours d'expérience. L'arbre des causes est plutôt une méthode pour organiser les informations recueillies à propos d'une défaillance et donc l'analyser, qu'un guide pour recueillir les informations. Le caractère ordonné de la représentation en arbre peut attirer l'attention sur un trou dans les informations.

L'arbre des causes se focalise généralement sur la représentation de l'ensemble des combinaisons de causes d'un scénario de défaillance particulier afin d'expliquer la défaillance qui est apparue (contrairement à l'arbre de défaillance qui vise à rechercher l'ensemble des scénarios pouvant conduire à une défaillance). Les différences existant entre les trois arbres les plus couramment utilisés (arbre de défaillance, arbre des causes et arbre d'événement) sont détaillées ci-dessous.

Remarque :

Cette méthode est souvent considérée à tort, selon Y. Mortureux (Mortureux, 05), comme équivalente à la Méthode de l'Arbre de Défaillance.

Fondamental :

Distinction entre les méthodes des Arbres de Défaillance, des Causes et d'Evénement

Ces trois méthodes ont en commun de représenter la logique d'un système sous forme arborescente. Cependant ces méthodes répondent à des besoins différents et ne contiennent pas les mêmes informations.

La figure 12 schématise les principales distinctions que l'on peut faire, du point de vue des objectifs attendus, entre ces trois méthodes.

Figure 12 : Distinction entre arbres de défaillance, des causes et d'événements - inspirée de (Mortureux, 02a)
Figure 12 : Distinction entre arbres de défaillance, des causes et d'événements - inspirée de (Mortureux, 02a)[Zoom...]

Démarche

Méthode :

La démarche de l'arbre des causes comprend trois phases : le recueil d'information, la construction de l'arbre et l'exploitation de cet arbre.

Recueil d'information

Méthode :

L'arbre des causes est une représentation graphique de l'ensemble des causes et leurs combinaisons ayant contribué à la réalisation d'un scénario de défaillance particulier. Avant de représenter cette information, il faut au préalable la collecter. Il existe pour cela différentes techniques (Mucchielli, 94) :

  • introspection : auto-analyse de l'expert des connaissances qu'il possède. Les limites de cette méthode sont d'une part l'aspect très subjectif des retranscriptions de l'expert et d'autre part des erreurs de compréhension lors de l'utilisation de ces données ;

  • description phénoménologique : méthode de description du vécu, en éliminant le plus rigoureusement possible l'explication de ce phénomène. Il s'agit donc d'une retranscription des faits observés par l'expert sans analyse par règle experte. Cette méthode semble peu répondre à notre problématique, puisque nous cherchons à recueillir les dires d'expert et non les faits observés par un expert ;

  • entretiens et interviews : un interviewer cherche à recueillir directement ou indirectement les connaissances d'un ou de plusieurs interviewé (experts). Un entretien est soit directif (l'interviewer questionne l'interviewé) soit semi-directif (l'interviewé reformule régulièrement au cours de l'entretien les propos de l'interviewer et demande confirmation) soit non-directif / ouvert (l'entretien repose sur l'expression libre des idées de l'interviewé sur un sujet). Cette méthode semble la mieux adaptée à notre problématique, cependant la compréhension de l'interviewé par l'interviewer peut être partiellement inexacte, ce qui introduit de l'imprécision dans les données issues de dires d'expert.

Construction de l'arbre des causes

Méthode :

On n'utilise généralement que deux symboles pour représenter un fait :

  • le rectangle pour représenter un fait « normal » ;

  • l'ellipse ou ovale ou cercle pour représenter un fait « anormal » ou « inhabituel ».

Ces faits sont liés entre eux par des traits qui expriment la relation de cause à effet. Ces traits prennent deux formes :

  • le trait qui relie deux faits ou enchaînement simple ;

  • la fourche qui relie plusieurs faits d'un côté à un fait de l'autre.

La fourche peut, a priori, avoir deux sens :

  • la conjonction : plusieurs faits-causes, ensemble, ont une conséquence ;

  • la disjonction : un fait à plusieurs conséquences.

En général, seule la conjonction est utilisée dans les arbres de cause.

Par convention et par habitude, un arbre de causes est très souvent présenté horizontalement, le fait final étudié étant le plus à droite. La position d'un fait à droite ou à gauche par rapport à un autre n'a de signification que s'ils sont sur une même branche, reliés par une suite continue de traits de même sens (cause vers conséquence). Les positions relatives de deux faits de deux branches différentes n'ont aucune signification.

La première phase de la construction de l'arbre des causes consiste à définir la défaillance.

La deuxième phase consiste à remonter pas à pas jusqu'aux causes d'origines. On cherche à chaque pas de construction à répondre à la question « Qu'a-t-il fallu pour que ... ? ». On vérifie ensuite qu'on répond « non » à la question « Y a-t-il d'autres causes » et à la question « la défaillance que je cherche à expliquer aurait-elle cependant eu lieu si l'une des causes n'avait pas été réalisée ? ».

La construction de l'arbre s'arrête normalement quand on en est arrivé à des causes origines qui ne s'expliquent plus pour le système étudié (circonstances extérieures, hasards, ...). Normalement on a aussi alors utilisé toute l'information collectée précédemment.

Exploitation de l'arbre des causes

Méthode :

L'exploitation normale d'un arbre des causes est la recherche de mesures, c'est-à-dire de modifications du système susceptibles de prévenir une nouvelle occurrence de la défaillance étudiée. Dans ce sens il faut considérer les conséquences de cette défaillance, c'est-à-dire que les mesures doivent empêcher que le scénario aboutisse aux mêmes conséquences dommageables.

La démarche consiste à passer en revue les causes de l'arbre et pour chacune d'elles à se demander :

  • qu'est ce qui pourrait empêcher cette cause de se produire ?

  • qu'est ce qui pourrait en réduire les conséquences ?

A priori, la première question n'est pas pertinente pour les causes « normales ». Toutefois, il est utile de se demander si on n'accepte pas comme « normale », par habitude, une cause dangereuse. Il faut alors, malgré le poids généralement très fort des justifications dues à l'habitude, chercher à rendre anormale cette cause.

Nous appelons mesure une proposition de modification du système pour remédier à une occurrence forte de défaillance.

Une fois les idées de mesures recueillies, elles doivent être triées et évaluées. Le tri s'effectue de la manière suivante :

  • s'assurer que la mesure proposée, si elle fonctionne, a bien les effets attendus,

  • s'assurer grossièrement qu'elle n'est pas irréaliste,

  • s'assurer grossièrement qu'elle n'a pas d'effets négatifs inacceptables.

Après ce tri, les mesures non éliminées doivent être évaluées :

  • quels sont les effets attendus de la mesure sur le scénario étudié ? (a priori plus une mesure intervient en amont d'un arbre plus elle est prometteuse, mais ce n'est pas toujours confirmé) ;

  • quels sont les effets attendus de cette mesure en dehors du scénario d'accident étudié ?

  • quelle valeur globale attribuer à l'ensemble des effets prévisibles de cette mesure ?

  • quel coût pour la mesure ?

L'évaluation d'une mesure doit prendre en compte ce qu'elle est censée apporter modulé à la fois par le taux de succès qu'on peut espérer et par son coût. Le délai raisonnable de mise en œuvre de la mesure doit être pris en compte dans l'évaluation de son apport. Les effets d'une mesure ne se limitent pas à son impact sur le scénario décrit par l'arbre des causes ; il faut chercher dans toutes les directions. Chaque mesure peut donc apparaître avec ses avantages, ses inconvénients et ses coûts. On peut évidemment les classer par ordre de rapport avantage / inconvénient et coûts. Mais on peut faire mieux en recherchant des combinaisons de remèdes complémentaires dont les avantages s'additionnent bien alors que les inconvénients de chacun sont réduits par les autres.

Illustration

Exemple :

Considérons un escalier à structure métallique accolé à un mur avec des antidérapants sur les nez de marche, une main courante fixée à ce mur et une personne descendant cet escalier. Un arbre des causes conduisant à l'événement redouté « la personne chute dans l'escalier » peut être le suivant :

Figure 13 : Exemple d'arbre des causes pour le cas d'une chute dans un escalier
Figure 13 : Exemple d'arbre des causes pour le cas d'une chute dans un escalier[Zoom...]

En examinant l'arbre des causes de la figure 13, nous pouvons proposer les mesures suivantes :

  • mettre des tapis au niveau des accès provenant de l'extérieur,

  • vérifier régulièrement les fixations de la main courante,

  • installer des mains courantes de manière à pouvoir les attraper quelle que soit la position dans l'escalier,

  • installer des marches absorbant l'eau,

  • prévoir une vérification et une réparation immédiate (en cas de dégradation) des nez de marche antidérapants,

  • prévoir une campagne d'information des dangers de chute dans les escaliers.

On remarque que les mesures proposées non pas le même coût (achat et entretien d'un tapis et campagne d'avertissement par exemple), que le délai d'application n'est pas identique (installation d'une nouvelle main courante et installation d'un tapis par exemple), que les personnes qui devront appliquer ces mesures ne sont pas les mêmes (vérification régulière des fixations et mise en place d'une campagne d'avertissement par exemple) et que le gain en sécurité apporté par ces mesures n'est pas identique (installation d'un tapis et campagne d'information par exemple).

Intérêts et limites

Fondamental :

Les principaux intérêts de cette méthode sont les suivants :

  • elle est simple à mettre en œuvre,

  • elle favorise le caractère systématique de la recherche des événements (causes) et de leurs liens logiques,

  • elle aide à mettre en évidence ce qui différencie le scénario étudié du scénario « normal » de référence, c'est-à-dire qu'elle fait la distinction entre les événements normaux et les événements anormaux,

  • elle favorise la recherche et l'évaluation de mesures de prévention ou de protection destinées à éviter le retour de l'événement ou de ses conséquences fâcheuses.

Les principales limites de cette méthode sont les suivantes :

  • elle ne permet pas une représentation chronologique des événements,

  • il s'agit d'une méthode binaire, c'est-à-dire que les événements se produisent ou ne se produisent pas, il n'y a pas de stade intermédiaire,

  • l'arbre des causes ne permet pas de distinguer la différence entre des combinaisons en « OU » et des combinaisons en « ET » entre les différents événements.

Informations complémentaires

(Previnfo, 08), (Desroches et al., 06), (Giraud, 06), (Mortureux, 05), (Mortureux, 02a), (Mortureux, 01), (Zwingelstein, 99).

Méthode de l'Arbre des causes (page suivante)Méthode de l'Arbre de Défaillance ou de Défaut ou de Faute (page Précédente)
AccueilImprimerRéalisé avec SCENARI